UNE PLANTE TRÈS, TRÈS, TRÈS ANCIENNE

Ceci est une version courte et synthétique. (temps de lecture 5min)

ÉTYMOLOGIQUE

Que ce soit chanvre, marijuana ou cannabis, c’est la même plante.

-Le terme chanvre « fil et filasse » dérive du vieux français « chenvre », « plante-textile ».

-Quant à « marijuana » issu de l’espagnol mexicain, il se relie à la drogue.

-Le mot « cannabis » quant à lui sert à l’identifier par son nom botanique « cannabis sativa » ou « cannabis indica »

Saviez-vous que le terme latin cannabis réfère à l’expression « tige (cann) à (a) deux sexes (bis) »?

La plante possède effectivement la particularité d’avoir à la fois le sexe mâle et femelle. 

Il reste finalement tout l’arsenal d’expressions communes du genre, « herbe » , « weed » , « beuh »,« joint » et j’en oublie sûrement, se rapportant aux « pétards » qu’on fume sous forme de tabac séché ou coupé.

Antiquité

Il est très difficile d’identifier son lieu d’origine exacte. Certains évoquent l’Himalaya, d’autres la Mésopotamie mais bon nombre des sources s’entendent pour situer le sud-est de la Russie où on l’utilisait, entre autre, pour la fabrication d’arcs, d’armes de guerre, de farine et pour les filets de pêche. Les chinois quant à eux confectionnaient une fibre par broyage de la tige pour créer des tissus quatre fois plus résistant que le coton et cela, 4500 ans av. J-C. Son utilisation en Chine remonterait même jusqu’au 28e siècle av. J-C où l’empereur Shen Nung (2838-2698 av. J-C) l’incorpore dans sa pratique lors des fondations de la médecine chinoise traditionnelle. Mais, petit bémol non négligeable, le plant contient des cannabidoïdes.

De fait, on retrouve la mention des effets de cette molécule active d’aussi loin que dans les écrits grecques. Depuis des milliers d’années, les médecins de tout acabit la prescrivent sous forme d’huile, de graines ou en tabac comme antidouleur, pour soulager les maux des malades allant de la dépression jusqu’au cancer et j’en passe.

D’autre part, il est intéressant de noter qu’on s’en servait également pour la fabrication de papier. Inventé par les chinois, son secret fût conservé jusqu’au 5e siècle ap. J-C pour se perpétuer au Japon, au Moyen-Orient et enfin apparaître au 13e siècle en Europe.

Moyen-âge

Les moines copistes travaillaient sur du papier de chanvre à la lumière d’une lampe à l’huile de chanvre. Moult textes mentionnent qu’apparemment le premier livre (la Bible) imprimé au monde, édité par Johannes Gutenberg  l’aurait été sur du papier de chanvre. En fait, il se retrouve à tellement d’endroits, tant d’époques et côtoie autant d’empires qu’il devient ridicule de tous les mentionner. Sans doute pour sa facilité de culture. D’une taille pouvant aller jusqu’à 4 mètres, cette annuelle à croissance rapide atteint sa pleine maturité en 4 mois. Elle n’a pas besoin d’herbicide car sa densification et sa hauteur épuise toutes les autres mauvaises herbes. Aucun insecticide n’est non plus requis car elle possède sa propre réserve de répulsif naturelle.

Temps Moderne

En 1484, le pape Innocent VIII (1432-1492) déclarera sacrilège son utilisation et seul les gens, habituellement des femmes, ayant une très bonne connaissance en herboristerie continueront de transmettre ce savoir en déclin. Inutile de vous rappeler qu’on les accusait de sorcellerie pour ainsi détenir ces connaissances hors de l’entendement.

Christophe Colomb parmi les cadeaux remis aux autochtones, apporta le cannabis sous forme de graines et de vêtements en chanvre lorsqu’il découvrit l’Amérique en 1492.

Epoque contemporaine

La popularité grandissante du cannabis-textile s’étendait un peu partout dans le monde avec la poussée de la colonisation. L’Espagne le cultivait au Chili, la Grande-Bretagne en Nouvelle-Angleterre et les entrepôts royaux français promettaient quant à eux d’acheter tout le cannabis produit par les agriculteurs canadiens. Plusieurs noms de villes et régions du Québec ont même été baptisé de noms liés à cette importante culture d’autrefois comme Hampshire, Hempstead et Hampton.

Napoléon signera un accord le 07 juillet 1807 avec le tsar Alexandre 1er. Le traité de Tilsit interdira l’expédition de chanvre en Angleterre et aux États-Unis. Mais Alexandre 1er laissera quand même passer le chanvre en contrebande en destination de l’Angleterre. C’est l’un des éléments qui poussera Napoléon à envahir la Russie en 1812.

Dans l’Europe du 19e siècle, la mode vibrera au cannabis. L’orient et ses mystères provoqueront les passions; notamment le fumage du haschisch selon la méthode de la pipe à eau. Même la reine Victoria deviendra une adepte de la confiture de haschisch pour calmer ses menstruations douloureuses, comme bon nombre de femmes de l’époque.

À la fin du 19e siècle, les immigrants indiens introduisirent le cannabis au Mexique où il prendra le nom de « marijuana » et deviendra le symbole de la révolution « Pancho Villa » avec la chanson « la cucaracha » un cafard ne pouvant plus avancer faute de cannabis à fumer.

Considéré comme démoralisant pour les soldats français, le haschisch est interdit au beau milieu de la première Grande Guerre, un an après l’absinthe, par la « loi sur les substances vénéneuses » du 12 juillet 1916 au même titre que la morphine ou la cocaïne.

Aux États-Unis, à cette époque, Harry J. Anslinger, personnage politique influent, s’est dit: « interdisons le chanvre ». W. Randolph Hearst, magnat de la presse écrite, l’a suivi ainsi que la compagnie Dupont, une entreprise de produits chimiques. Les trois groupes formèrent un lobby rejoint par l’industrie du coton pour interdire le chanvre. La raison derrière ce front commun résidait dans le ré-intérêt économique relatif au chanvre. Par exemple, avant les années 1930, il fallait 300 heures pour planter, ramasser et extraire la fibre d’un acre de chanvre. Par la suite, ce temps de 300 heures pour un homme tomba à 1 heure par homme avec l’utilisation des nouvelles machines.

Lorsque les japonais bombardent Pearl Harbor, ils obligent les américains à entrer en guerre. Ceux-ci s’aperçoivent qu’ils n’ont plus accès à leurs sources d’approvisionnement en chanvre. Car, malgré tout, les États-Unis dépendent entièrement du chanvre pour les cordages, les fils et ficelles pour les chaussures ainsi que des équipements divers. Ils décidèrent de démarrer une industrie de guerre pour le chanvre. Ils légalisèrent à nouveau la marijuana et distribuèrent des graines à ses fermiers. Ils adoptèrent même un chant « du chanvre pour la victoire » pour encourager cet effort de guerre.

Néanmoins, une fois les japonais chassés des Philippines en 1944, les niveaux de production de chanvre d’avant-guerre reviennent à la normale. Après les années de guerre, un nouveau monde apparaît. L’Inde obtient son indépendance grâce à la mécanisation; le pays double sa production et peut développer ses exportations vers les États-Unis et le reste du monde. Comme par hasard, les américains interdisent de nouveau la culture du chanvre sur leur territoire mais en important des milliers de tonnes pour approvisionner l’industrie lors du boom économique.

La France quant à elle, malgré la prohibition des États-Unis, continue à produire du chanvre jusque dans les années 1950. Mais le développement des fibres synthétiques un peu partout dans le monde a drastiquement fait baisser cette production jusqu’à ce que l’industrie textile du chanvre ne meure de sa belle mort à la fin des années 1960. Durant ces années, les groupes rock et les hippies encouragent la consommation de cannabis. En 1970, les Rastas en Jamaïque consomment le cannabis pour communiquer avec leur Dieu; qu’ils considèrent comme la nourriture spirituelle.

Toujours dans les mêmes années, le cannabis est légalisé à Amsterdam tandis qu’en France, la détention et la consommation de cannabis relèvent du droit pénal, selon la Loi du 31 décembre 1970, relative aux mesures sanitaires de lutte contre la toxicomanie et à la répression du trafic et de l'usage illicite de substances vénéneuses.

En novembre 2018, l'Assemblée nationale vote le principe d'une contravention forfaitaire payable immédiatement de 200 € pour la détention d'une petite quantité de cannabis, le ministère public conservant la faculté de saisir le tribunal correctionnel où le contrevenant encourt un an de prison et 3 750 € d'amende. 

En juillet 2020, le Gouvernement annonce pour la « rentrée 2020 » la généralisation de cette contravention testée dans plusieurs villes comme Reims ou Rennes. L’amende initiale de 200€ est minorée à 150 euros si elle est réglée sous quinze jours Au-delà de 45 jours, le contrevenant devra s’acquitter d’une majoration fixée à 450 euro

Le 30 décembre 2021, un arrêté paru au journal officiel annonçait que le gouvernement décidait d'encadrer l'utilisation industrielle et commerciale du chanvre.

Le 24 janvier 2022, le Conseil d’Etat suspend l’arrêté du 31 décembre 2021 sur l’interdiction de la vente de fleurs et de feuilles de chanvre.

Le CBD s’avère donc, à ce jour, tout à fait légal.